Samedi assez intéressant et surtout paradoxal, entre une journée culturelle et un fin d’après-midi qui ne l’est pas moins mais dans un autre genre. On avait assisté à une conférence effectuée dernièrement par l’archéologue Martine Francis Allouche en compagnie de Nicolas Grimal, égyptologue reconnu, qui avait souligné l’importance particulière de l’arrière pays de Byblos concernant notamment l’apport au commerce de la ville phénicienne. L’étude de l’arrière pays pourrait notamment apporter un certain nombre de questions plus spécifiquement dans la localisation supposée du Port Phénicien de cette ville millénaire – le port actuel étant le port médiéval – et cette étude, non publiée encore a besoin d’être poursuivie pour confirmer ou infirmer les hypothèses actuelles.
A coté de cet intérêt économique et notamment le fait de ramener des troncs de cèdres qui descendaient via le fleuve de Nahr Brahim et celui de Fidar aujourd’hui asséché et ainsi de participer ainsi à la construction de navires marchants d’où la puissance maritime de Byblos, un intérêt cultuel, le culte d’Adonis ou Aphrodite des Grecs, Ishtar ou Astarté des Phéniciens et qui sera repris par les romains sous le culte de Vénus. Il se déroulait donc une procession qui allait de Byblos jusqu’aux sources d’Afqa située à 1800 mètres d’altitude, et ces processions ou Adonies passaient par une série de temple dont ceux de Machnaqa ou ceux que Yamouh. Pour encore replacer ce culte, il faut rappeler qu’enfant incestueux de Cinyras, roi de Chypre et de sa fille Myrrha, Adonis sera tué par lors d’une partie de chasse par un sanglier et qu’Aphrodite, inconsolable, le pleura et ses larmes donneront les anémones qu’on trouve dans la région. Autre point intéressant, la terre ferrugineuse rend les eaux printanières du Fleuve Nahr Brahim rouge et selon la légende locale, il s’agit du sang d’Adonis qui coule, constituant l’un des signaux de la fonte des neiges en hauteur et de l’arrivée du Printemps.
Pour évoquer ces histoires, rien de tel qu’une vidéo
Concernant Byblos, les Adonies -auxquelles seules les femmes participaient – se déroulaient sur 2 jours, un jour consacrée au deuil, la mort d’Adonis, et un deuxième jour consacré à la joie de la résurrection, corrélée à l’arrivée du Printemps.
Sur les traces des temples phéniciens, grecs et romains de l’arrière pays de Jbeil ou Byblos, on retrouve d’abord Machnaqa ou lieu des pleurs en Araméen (on était accompagné de spécialistes français en linguistique araméenne), localité à prédominance chiite, mais avec la présence d’une église chrétienne, probablement médiévale d’abord ou ont été réutilisées des pierres d’un temple romain situé plus en hauteur.
Se trouve un peu plus loin une nécropole romaine creusée à même la roche avec la présence de 3 bas-reliefs de l’époque bien visibles dont on ne peut que deviner les scènes désormais. Cette partie est également accessible via la route.
Encore un peu plus haut donc, un temple romain au lieu dénommé Chir el Meidan qui surplombe la vallée de Nahr Ibrahim. J’ai bien précisé romain, tout simplement parce qu’il n’y a jamais eu de fouilles sérieuses depuis les années 50 dans la région et que probablement, le site était déjà utilisé dans des temps plus anciens et donc peut-être déjà du temps des phéniciens.
Le site – qui appartient aujourd’hui au patriarcat maronite de Bkerké -se présente s’ouvre sur une porte monumentale et se présente en un rectangle d’une centaine de mètres de long pour 60 mètres de large à vue de nez et donne sur un autel ou l’on prétend que les prêtres procédaient à des sacrifies rituels lors des Adonies que l’on peut encore imaginer. On peut accéder à cet autel via des marches situées en arrières et vers le nord de l’édifice. Selon les explications de nos guides, les fidèles rassemblées circulaient autour de l’édifice alors que pleuraient des femmes lors du premier jour.
Malheureusement, les fouilles ne se sont pas poursuivies et les concepts de reconstruction de l’époque faisaient une large partie au béton actuel et on remarquera alors que les responsables d’alors n’ont pas échappé dans cette conception notamment dans la reconstruction de l’autel datant des années 50…. La localisation de ce complexe se situe sur la route supposée des différentes processions religieuses qui allaient célébrer Adonis et Ishtar depuis la ville-cité de Byblos et surplombant le fleuve de Nahr Ibrahim anciennement dénommé fleuve d’Adonis.
Nous poursuivrons notre visite avec Yanouh puis aux sources même de Nahr Ibrahim ou le fleuve d’Adonis pour achever ce voyage aux racines de la mythologie phénicienne de la région libanaise de Byblos.
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