Jamais deux puissances nucléaires – Etats-Unis et Russie – n’ont été aussi proches d’une confrontation directe et imminente depuis la Crise de Cuba en 1962 et pour cause, jamais, les responsables américains et russes n’ont pris autant de risque qu’en se menaçant directement sur le théâtre syrien.
La confrontation a commencé avec les accusations de bombardement à l’arme chimique sur le réduit rebelle de Ghouta, tenu par Jeish al Islam.
Cette confrontation semble imminente en raison de déplacements d’avions ravitailleurs occidentaux vers la Méditerrané Orientale. De même, le Ministère Russe de la Défense note des déplacements de navires de guerre américains dans le Golfe en vue de frappes militaires.
Analyse
Ces tensions interviennent après le rejet par le Conseil de Sécurité de 2 résolutions concernant l’enquête sur l’utilisation ou pas de gaz chimiques par l’Armée Syrienne contre cette enclave rebelle. L’une des résolutions, américaine, a fait face au véto russe et l’autre résolution, russe, n’a pas récolté un nombre suffisants de voix.
L’ambassadeur de Russie au Liban, Alexandre Zassipkine, a déclaré à la chaine de télévision du Hezbollah que « tout missile américain qui viendrait à être tiré sur la Syrie serait abattu et les sites d’où ils auraient décollé seraient pris pour cibles« , marquant une grave escalade du conflit syrien. Ce dernier se référait à une déclaration du président russe Vladimir Poutine et une autre du chef d’état-major des armées russes concernant de possibles frappes occidentales contre des bases syriennes.
Différentes rumeurs faisant également état de simulation d’attaque aérienne par des avions russes contre un bâtiment de l’US Navy ont également été entendues ce matin avant d’être démenties par l’US Navy elle-même.
Le Président Américain a également réagi aux propos de l’Ambassadeur Russe au Liban:
Russia vows to shoot down any and all missiles fired at Syria. Get ready Russia, because they will be coming, nice and new and “smart!” You shouldn’t be partners with a Gas Killing Animal who kills his people and enjoys it!
— Donald J. Trump (@realDonaldTrump) 11 avril 2018
Côté Français, un peu de prudence mais un alignement tout de même sur Washington
Les Russes déjà sur place, les États-Unis semblent se préparer à une attaque
Côté préparatif à une possible attaque et à une possible riposte, les États-Unis ont dernièrement multipliés les vols d’avion de surveillance au large des côtes syriennes et libanaises, le littoral libanais.
Par ailleurs, il semblerait que plusieurs avions ravitailleurs américains se déploient sur la zone, un préalable nécessaire pour mener des attaques aériennes.
Côté russe, les militaires déjà échaudés par le bombardement israélien de la base T4 située entre Homs et Palmyre sont en état d’alerte depuis leurs bases de Tartous pour la composante maritime et Hmeineih pour la composante aérienne. Ils disposent d’un système de défense antiaérien S400 et de différents types d’avions de combat et d’interception.
La marine russe semble avoir pris les devants en évacuant ses 11 bâtiments du port de Tartous.
L’Armée Syrienne se prépare à l’attaque, les alliés du régime syrien également
Sur ces fonds de bruit de bottes, l’Armée Syrienne se prépare à l’attaque en transférant notamment son matériel aérien le plus sophistiqué à Hmneineh, base de déploiement de l’Armée Russie.
On indique également que le Président Syrien aurait quitté le Palais Présidentiel avec un convoi russe pour se réfugier dans un lieu non-précisé.
L’Organisation internationale sur les armes chimiques (OIAC) nie toute attaque chimique
À noter que l’Organisation internationale sur les armes chimiques, mandatée par l’ONU afin d’enquêter sur de possibles attaques chimique le théâtre d’opération syrien nie l’existence d’une telle attaque chimique sur le réduit du Ghouta, contrairement aux déclarations américaines et occidentales.
L’OIAC, invité par Damas, confirme les informations russes.
L’OIAC compte envoyer des inspecteurs en Syrie pour enquêter sur cet incident. Cela pourrait retarder une attaque américaine, selon certains experts.
Organization for the Prohibition of Chemical Weapons says it is sending inspectors to Syria to investigate the weekend suspected chemical weapons attack, a move that could throw a wrench in Trump’s plans to quickly respond « forcefully. »
— Dion Nissenbaum (@DionNissenbaum) 10 avril 2018
« L’OIAC dit envoyer des inspecteurs en Syrie pour enquêter sur l’attaque soupçonnée d’armes chimiques du week-end, une décision qui pourrait arrêter les plans de Trump qui souhaite répondre rapidement « avec force ».«
Pour leur part, les autorités américaines réfutent ces informations:
Tentative de désescalade verbale entre Moscou et Washington
En Israël, on se contente d’un silence radio à l’issue d’une réunion du Premier Ministre avec ses responsables sécuritaires. Iron Dome a cependant été déployé au Golan.
Qui est Jeish al Islam?
Jeish al Islam est organisation salafiste proche de l’Arabie Saoudite opérant essentiellement dans la Ghouta. Le nombre de combattants au sein de cette organisation oscille entre 15 000 et 20 000, selon les services de renseignements occidentaux. Ce mouvement a fait alliance d’abord avec l’Armée Syrienne Libre pour ensuite entrer en conflit avec elle, puis s’allier avec Jaych al-Foustate, proche d’Al Nosra, ex-franchise d’Al Qaida. Ils ont été accusés d’enlèvement, de torture et d’assassinat, y compris par des personnes de l’opposition au régime syrien.
Perdre la Ghouta reviendrait à perdre son théâtre d’opération d’où les difficultés à accepter un retrait vers les provinces d’Idlib et du Nord de la Syrie – quant à elles sous influence turque qui est désormais antagoniste à l’Arabie Saoudite sur la question syrienne – sans leurs armes lourdes.