« Je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites, mais je me battrai pour que vous ayez le droit de le dire. », citation attribuée à Voltaire.
C’est par cette situation qu’un élan de solidarité a transcendé les frontières politiques et sociales de part le Monde entier, en solidarité avec les victimes – journalistes du quotidien Charlie Hebdo et policiers – abattues par des islamistes en France. Qui peut mieux qu’un libanais, comprendre ce que mourrir pour sa liberté veut dire? Combien de journalistes au Liban et de membres des forces de sécurité, perdent quasi annuellement la vie? On se souviendra des plus connus, Kamal Mroueh pour nos anciens, Gébran Tuéni ou Samir Kassir pour les générations les plus récentes, des François Hajj et de ces soldats inconnus aux yeux de tous mais connus de leurs familles qui ont donné leurs vies à Nahr Bared en 2007, à Arsal ou à Saida en 2014. Certains ont rapidement remplacé le tag #onestcharlie par #onestBeyrouth ou #onestsamir etc… mais peut-être, ils ont alors rompu la chaine de la Solidarité, au profit d’un amalgame local, d’une diversion alors que l’élan de solidarité est mondial.
Cependant, qui peut mieux que les libanais voir la souffrance infligée par le radicalisme religieux qui se trouve aux portes et même parfois à l’intérieur du Pays? Que doivent penser les victimes de ces terroristes en Syrie ou au Yemen, un terrorisme parfois même auparavant soutenu par les pays occidentaux si ce n’est pas favorisé comme en Libye, par le combat contre une dictature certes, mais une dictature trop vite remplacée par le chaos qui nourri ces extrémistes. Chaque jour, en Syrie, en Irak, au Yemen, pour ne pas aussi nommer le Nigéria, la Libye, et ces autres pays oubliés des informations, ces mêmes extrémistes tuent des innocents, parfois d’une manière encore plus brutale. Quoi de plus inhumain que de décapiter au couteau.
Certes, mourir pour un dessin est bien con, certains prétendent même qu’ils l’ont bien mérité, mais tuer pour un dessin est encore plus con. Déjà en 2006, Ashrafieh – quartier chrétien de Beyrouth – a été dévastée par une horde de ces mêmes fondamentalistes au nom de ces mêmes dessins dont aujourd’hui Cabu, Charb et les 16 autres personnes en ont été victimes. On a été également témoin des tirs de joie à l’annonce de l’acte terroriste dans certains endroits de non droit et notamment dans le camps palestinien d’Ein Helwé, zone de non droit, zone interdite aux forces de sécurité libanaises et ou se regroupent plusieurs organisations terroristes, Fatah la Islam, Johbat el Ansar, palestiniennes, syriennes ou simplement même arabes, preuve que le vers est déjà dans le fruit. Il s’agit maintenant également de le traiter avant qu’il ne soit pas trop tard.
On peut ne pas être d’accord avec une personne sur beaucoup de sujet, mais est ce que cela justifiera alors de le tuer, même au nom de la religion? Cela dénote en effet l’absence d’arguments solides pour prouver simplement que les auteurs de ces dessins ont tord, c’est leur accorder en fin de compte raison. Plus encore que l’opinion, d’autres personnes sont tuées parce qu’elles vivent tout simplement. Quand est-il donc de toutes ces personnes qui meurent aujourd’hui en raison de leurs opinions diverses mais contraire aux dogmes véhiculés par ces radicaux? Quand est-il des martyrs de la foi, animistes, laïques, chrétiens, yazidis, chiites voir mêmes sunnites modérés qui ont le tord de ne pas être salafistes ou takfiristes? Leur massacre est quotidien, et après avoir fait les unes des journaux, ces mêmes massacres sont aujourd’hui malheureusement bien vite oubliés. Le même jour ou Charlie Hebdo agonisait, 100 personnes ont été tuées par Boko Haram au Nigéria, on ne compte également plus le nombre de victimes en Syrie ou en Irak, quant au Yemen, silence radio.
Ce n’est pas en France qu’on mène la guerre contre ces islamistes radicaux, ces individus agissent aujourd’hui en France parce que les pays occidentaux, et parmi eux la France, ont pavé la voie de leurs actes criminels en Orient, en Syrie notamment, en les armant parfois, en laissant faire plus généralement, les laissant se former à la guerre. Selon certaines sources, il y aurait plus de 1500 français combattants actuellement dans les rangs de Daech. Certains ont pensé qu’il est préférable qu’ils aillent se faire tuer en Syrie. Mauvais calcul, et surtout calcul horrible, sous-entendant qu’il est préférable qu’ils aillent tuer des syriens que des français et mauvais calcul aussi parce que les plus aguerries reviendraient, comme autant de bombes à retardement qui menaceront d’exploser à leur retour dans la Métropole. Les libanais aussi ont souffert de ce mauvais calcul, en témoigne par exemple, en plein coeur de l’été et de la capitale libanaise, la tentative d’attentat effectuée par un ressortissant français d’origine comorienne et depuis revendiquée par Al Qaida, cette même organisation dont se réclament les 2 frères Kaouchi.
Certaines rumeurs prétendent que les services de renseignement libanais ont mis en garde leurs homologues français de l’imminence d’opérations terroristes dont le massacre de Charlie Hebdo n’est qu’un funeste préliminaire, confirmant par cela même que le Liban est également aux premières loges d’un combat global contre la terreur qu’il n’a que trop connu. Mais aussi un combat que le Pays des Cèdres a eu trop à en souffrir en raison du manque de solidarité des années durant, d’une communauté internationale, occidentale indifférente et arabe exportant même son terrorisme sur notre territoire. Espérons que demain, ces erreurs ne se répèteront pas et que le Liban ou que même tout autre pays, Irak, Syrie, Nigéria, etc… jouiront de tous les soutiens nécessaires, politiques, économiques et surtout militaires, pour que l’Histoire ne se répète pas.
François el Bacha.
Mise à Jour: Depuis l’écriture de cet article, un attentat suicide perpétré notamment par 2 kamikazes dont un ressortissant yéménite – ce qui n’est pas sans rappeler les funestes évènements qui se sont déroulés en France – , a eu lieu dans la ville de Tripoli au Nord Liban, faisant 4 victimes selon les premiers bilans. Cet acte terroriste a été revendiqué par Daech, confirmant donc les craintes devenues légitimes dans la situation actuelle. Ce nouvel état de fait confirme que désormais le terrorisme est global et que cela soit l’Orient ou l’Occident, tout le monde est concerné. On ne peut répondre à un terrorisme global que par une action globale et combattre l’hydre de la terreur ou qu’il se trouve.