À la vue des derniers développements, on comprend bien que la formation du prochain gouvernement est une priorité alors que la situation économique se dégrade. D’ailleurs c’est également la raison pourquoi le Premier Ministre désigné, assez usé par cette tâche de formation de son cabinet, Saad Hariri pour ne pas le nommer, est parti « en visite familiale » à Paris.
Avec le downgrade, c’est à dire l’abaissement, des obligations de l’état libanais désormais au rang des obligations pourries pour Moody’s et les perspectives négatives de certaines banques libanaises comme Audi ou Byblos pour Fitch qui étaient déjà coutées B- c’est à dire comme étant des valeurs hautement spéculatives, le Liban n’a jamais été dans des draps plus sales. Mais il était déjà totalement aberrant que le Pays des Cèdres n’ait pas été plus tôt dans la crise économique.
Pourtant, la classe politique n’est que le reflet du peuple: notre menfichisme et notre culture du Malaachi, la mobilisation sur Facebook, la prise de photo genre challenge et BimboLand sur Instagram, au lieu de se retrousser les manches.
Tout semble aller bien, mais en réalité rien ne va plus. Il semblerait que ce pays marche à une énergie psychologique, ignorant les réalités qu’elles soient politiques, géostratégiques ou économiques, donnant l’impression d’une voiture lancée à toute vitesse sur un mur avec un conducteur qui accélère encore au lieu d’appuyer sur les freins.
Cette fuite en avant est quelque peu à l’image de cet achat d’obligations libanaises par le Qatar qui serait effectué – selon certaines informations – non pas à taux préférentiel comme on nous le suggérait d’abord mais aux taux du marché. Grosso modo, on va emprunter de l’argent pour payer les fonctionnaire publics et encore aggraver la crise au lieu d’avoir un gouvernement, des réformes, etc…
Face à la dégradation des notes des obligations libanaises par Moody’s, nos dirigeants, Chef de l’État, Ministre des Finances, Gouverneurs de la Banque Centrale, etc… se sont voulus être rassurants: Pas de dévaluation de la Livre Libanaise, pas de restructuration ou d’étalement de la dette publique. La pression s’est alors quelque peu amoindrie. Cela est pour l’aspect psychologique de notre économie.
Cependant, il faut également avoir une approche plus scientifique, plus rationnelle:
La baisse de la note de l’État va augmenter sur le moyen et le long terme les taux d’intérêts sur les obligations libanaises et par conséquent aggraver plus encore les déficits budgétaires
Le fait que les banques étant autant exposées à ce type d’obligations puisqu’on les a quasiment obligé à financer l’état explique la perspective négative donnée par Fitch à 2 établissements bancaires figurant dans le top 3.
Également à moyen ou long terme, malgré une amélioration immédiate, les 500 millions qatari complétés probablement par les Saoudiens serviront encore à aggraver nos déficits publics, donc participant à une sorte de cycle infernal dont on n’arrive pas à sortir.
Évidemment, on a besoin d’un gouvernement fonctionnel et non d’un gouvernement déchiré par des clivages politiques. Évidemment nous avons besoin de réformes économiques et monétaires et plus nous attendons et plus la situation se dégrade, ce qui aura pour conséquence, encore d’aggraver plus les conditions socio-économiques de notre population.
Et évidemment, il s’agit aujourd’hui de revenir aux fondamentaux et de retrousser les manches. Mais pour cela, il nous faut un capitaine à la barre et non des hommes politiques n’ayant aucune conscience de la gravité de la situation pour nous diriger et nous quitter pour des vacances à la moindre occasion. Et encore moins un peuple qui ne pense qu’à sembler s’amuser dans des boites de nuits, restaurants pour poster sur les réseaux sociaux des photos faisant la promotion d’un beau pays qu’on a bien mal géré.