Deux nouvelles cette semaine, l’émission par le gouvernement libanais – démissionnaire, rappelons-le – de nouveaux Eurobonds à hauteur de 1,1 milliards de Dollars, et le maintien de la perspective négative de la note B du Pays des Cèdres par l’agence de notation S&P, ce qui ne manquera pas de faire augmenter les coûts de l’émission pour les contribuables libanais comme en témoigne l’aspect « très spéculatif » de la note.
Le timing adopté de l’émission tend à prendre en compte une baisse actuelle des taux et serait subdivisée en 2 parties selon les informations publiées par Bloomberg, avec 600 millions USD et une maturité en 2023 à 6,15% et 500 millions USD avec une maturité à 2027 à 6,7%, pour une moyenne régionale de 5,72% selon Jp Morgan. Selon cette source, cette émission vise également à remplacer une partie des bonds du trésor négociés en devise locale par des devises étrangères. D’autres sources affirment que cette émission vise à remplacer des Eurobonds d’un montant de 1,5 milliards US et arrivant à échéance en 2013.
Un rappel s’impose, la dette publique atteint au début de l’année officiellement 56 milliards USD, la part de la dette contractée à l’étranger est estimée à 29 milliards en 2011 selon les derniers chiffres publiés, soit une légère amélioration par rapport aux chiffres de 2010 quand la dette publique externe atteignait plus de 32 milliards US, pour un PIB de 49,19 milliards de Dollars US.
Cette évolution intervient dans un contexte de détérioration des finances publiques avec un déficit en hausse à 46,4%. Déjà traditionnellement grévé par les dépenses principalement dues en raison de la situation chaotique de l’Electricité du Liban, on peut notamment estimer que le projet d’augmentation des salaires de la fonction publique n’arrangera pas ce paramètre.
Agence | Notation | Perspective |
Fitch | B | Stable |
Moody’s | B1 | Stable |
Standard & Poor’s | B | Négatif |
Deuxième nouvelle, la note B/B avec perspective négative attribuée par S&P et qui pourrait entrainer une dégradation par d’autres agences de notation, S&P citant notamment une dégradation supplémentaire des déficits publics après une amélioration ces 5 dernières années, le taux Dette/PIB passant de 178% en 2008 à 136% en 2012, l’impact de la crise syrienne sur le Liban et notamment sur son industrie touristique, en très fort recul actuellement et sur le système financier. Également la situation politique actuellement incertaine, bien que liée à la crise syrienne, que le Liban connait actuellement une crise gouvernementale avec la démission du Premier Ministre Najib Mikati et une crise sécuritaire, ne sont guère propice aux progrès économiques. Ces développements impactent évidemment le climat économique. (Voir également ce document de S&P publié en Mai 2012).
Les craintes de S&P semblent aujourd’hui se concrétiser avec l’annonce de la hausse de l’endettement public de 8% à 58 milliards US, le pourcentage dette/PIB passant à 140%, en hausse de 4% en avril 2013, selon l’Association des Banques Libanaises, en raison du ralentissement de la croissance, désormais estimée à 2,8% selon les derniers chiffres de la BDL au lieu des 4,8% nécessaires et de l’impact de cette même crise sur les secteurs clés de l’économie, à savoir le tourisme (recul de 3,7% sur un an) et de l’industrie des BTP, recul en terme de valeur des transactions de 18,9% sur une année, ainsi qu’un recul des investissements étrangers de 68%, étrangers qui investissent principalement dans le secteur du BTP. Ces reculs affectent évidemment tant les rentrées fiscales que les revenus de l’état, avec un déficit passant de 3 milliards de dollars à 4 milliards de dollars et en l’absence de possibilité pour l’état de trouver une nouvelle source de revenue avant la mise en exploitation des gisements énergétiques qui se trouveraient au large du Liban en 2018 au meilleur cas.
Dans un tel contexte, il est évident que les investisseurs étrangers et locaux estiment préférables de sursoir à tout investissement à l’heure actuelle dans l’attente à une meilleure visibilité quant à l’avenir. Concernant spécifiquement le secteur du BTP, comme nous verrons demain, aucune des mesures de soutien prises par les autorités publiques n’impacteront effectivement de manière positive l’économie libanaise avant 2014. La crise donc semble se poursuivre à plus long terme pour le Liban.
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