Ainsi le procureur financier a demandé le gel des avoirs de 20 banques libanaises et de leurs dirigeants, estimant que ces établissements ont violé les droits des déposants. Il faisait clairement allusion à l’impossibilité pour les clients de ces banques de retirer leurs fonds.
Évidemment que cette décision était illégale puisqu’elle avait été décidée, non pas par les autorités de tutelles, c’est-à-dire ou la Banque du Liban (BDL), ou par le gouvernement et le ministère des finances, mais par une association privée, l’Association des Banques du Liban dont le Président fait également parti des personnes visées.
Aussi, il est raisonnable de penser que la stratégie consistant à ce que l’ABL et non BDL prenne à l’époque cette décision était motivée par la volonté de pouvoir tout de même transférer des fonds de personnalités politiques ou du monde des affaires en toute légalité, ce que le quidam, lui, ne pouvait pas faire.
C’est un des facteurs ayant abouti au défaut de confiance aujourd’hui envers le système financier libanais, ce dont les agences de notation ne s’étaient pas privées de rendre public quand elles ont commencé à dégrader les notes des principaux établissements bancaires libanais. La confiance de la population envers les banques est définitivement rompue jusqu’à ce qu’on ait des changements de leadership qu’ils soient dans les organismes publics et privés, des fusions et des faillites de banques au Liban, ce que les dirigeants de banques refusent généralement puisqu’elles sont plutôt, des affaires de familles, gérées par des incompétents placés pour leurs noms et en raison de proches au lieu de personnes compétentes.
On est loin d’une question seulement de recapitalisation du système bancaire, comme certains ont été tentés de nous le faire croire.
Il y a aussi et évidemment la question de conflits d’intérêts entre les banques et les déposants, les banques ayant conseillé d’investir dans des instruments financiers qu’ils savaient défectueux comme les obligations internationales et les bons du trésor libanais favorisant encore plus la dette publique au lieu de la réduire, ce que les experts indépendants, eux, n’hésitaient pas à dire sans être malheureusement écoutés.
D’ailleurs, sur les différentes plaintes déposées localement à l’encontre des banques suite à cette décision, toutes ont été gagnées par les clients et perdues par les établissements bancaires. Mais contrairement à des décisions « locales », il s’agit-là d’une décision sur le plan du pays, qui a des conséquences cataclysmiques.
Le procureur financier Ali Ibrahim, dans ses premières déclarations qui ont suivi l’annonce de cette décision, a invité les banques à corriger leurs erreurs, sous-entendant donc le fait de libérer les capitaux jusque là bloquées par le contrôle des capitaux. Après plusieurs mois durant lesquels, les déposants étaient dans l’impossibilité de le faire, on peut penser qu’il y aura une ruée vers les établissements bancaires déjà très affaiblis par les derniers mois de crises économiques, financières, la possibilité d’un défaut de paiement de la part de l’état, etc… La question est donc de savoir si les banques pourront donc supporter ce type de crise.
Jusque là, il était étonnant de voir le manque de sérieux des banques et des autorités de tutelle. Face à la crise, aucune fusion, aucune liquidation, aucune mise en faillite, comme si les difficultés des déposants ne trouvait pas écho, dans la crise, à celles des banques qui sont riches en théorie, sur le plan de livres comptables. Mais tout cela, comme le révèlent les derniers faits, étaient des châteaux de cartes qui s’écroulent aujourd’hui, les uns après les autres comme un domino
Il convient de pas trop s’inquiéter pour les dirigeants mais plutôt pour les épargnants, pour la population qui risque d’être également pénalisée par cette ruée. Ceux qui se réjouissent aujourd’hui pourrait également en être victime demain… puisqu’en cas d’effondrement du système financier, il ne restera plus rien sauf la misère à partager.
Il faut, en effet, rappeler que 56% des comptes bancaires ont un solde de moins de 3 333 USD. Il convient de rappeler que 50% de la population libanaise vit avec 4 dollars par jour désormais. C’est à eux et à leur intérêt désormais qu’il faut penser et non à ceux qui ont abusé de notre confiance durant les 25 dernières années et qui ne méritent qu’un châtiment exemplaire.