La visite de Marine Le Pen au Liban a été d’une part un désastre local mais également un succès à l’international. Bilan mitigé donc, avec une explication concernant la binationalité chère aux franco-libanais que nous n’aborderons pas ici.
Le coup d’éclat à Deir el Fatwa
Le coup d’éclat lors de sa visite à Deir el Fatwa, plus haute autorité sunnite au Liban a, en effet été l’occasion pour Marine Le Pen de refuser non pas de porter le Niqab (d’ailleurs qui est très rare au Liban) comme elle le prétendait mal un voile, disons le plus simple. Le piège posé par cet exercice de style était pourtant simple: Les autorités sunnites que cela soit au Liban ou ailleurs, ont toujours dénoncé la politique française concernant le port du voile.
La condition de l’incident lors de la rencontre était donc posée malgré les versions et les explications divergentes des 2 parties, d’un côté Marine Le Pen qui indique ne pas avoir obtenu de réponses quant à la possibilité de voir le dignitaire sans être voilé, chose démentie du côté du Mufti Deriane qui indique pourtant avoir répondu à cette question. Marine Le Pen pour sa défense indiquait que même lors de sa visite au Mufti d’Al Azhar considérée par certains comme étant la plus haute autorité sunnite, elle n’était effectivement pas voilée. Cependant, il aurait fallu lui dire que les autorités sunnites libanaises sont plutôt proches de celles, concurrentes, en Arabie Saoudite qu’en Egypte.
La candidate a l’élection présidentielle française de passage au Liban et leurs intérêts communs, bien involontairement, était de figer cet instant, d’une part pour le Mufti de la République pour montrer ou rappeler ses positions concernant le port du voile sur un plan interne et tenter par la médiatisation de l’affaire sur un plan international – ce qu’une certaine presse appelle un coup d’éclat – et d’autre part pour Marine Le Pen, c’était un moment de publicité rappelant à son électorat français ses positions sur la question alors que la France passe par une période de terrorisme islamique sunnite avec des radicaux parfois convertis locaux ou émigrés.
La Question Syrienne
Autre incident concernant la Syrie. Marine Le Pen a rappelé ses positions concernant le dirigeant syrien Bachar el Assad, une position de plus adoptée de manière réaliste par de nombreux pays comme on ne peut que le constater depuis la prise d’Alep: le régime syrien actuel est incontournable quoi qu’on en pense pour résoudre les problématiques d’une part de la guerre civile et d’autre part, pour contenir des menaces posées par ces organisations terroristes qui exportent leurs violences et leurs attentats jusqu’en Europe ou ailleurs. Cette position n’est évidemment pas partagée par certains partis et hommes libanais comme le dirigeant des Forces Libanaises, Samir Geagea.
Ce positionnement paradoxal entre d’un côté certains partis libanais et d’une part la nécessité aujourd’hui absolue pour la communauté internationale de régler le conflit syrien ne fait que raviver également le fossé profond au sein même de la sphère politique libanaise, contrairement aux usages qui veulent plutôt que les personnalités politiques en visite au Pays des Cèdres oeuvrent au rapprochement des différentes positions antagonistes.
Cependant le succès principal de la visite de Marine Le Pen est indéniablement d’avoir réussi à rencontrer un dirigeant chrétien d’un pays arabe et de faire médiatiquement parler d’elle et de débattre autour de son programme concernant le port des signes religieux ostentatoires et de faire connaitre son positionnement politique concernant une question d’actualité internationale, à savoir la Syrie.
Ces 2 objectifs ont été largement remplis lors de son séjour et cela au détriment des libanais eux-même, avec un rappel des conflits religieux entre communautés chrétiennes et musulmanes sur la question du voile comme on peut le constater au travers des réseaux sociaux où la question fait débat et d’autre part le conflit politique majeur, en premier lieu au sein même de la communauté chrétienne, de ces 10 dernières années, à savoir quelle attitude à adopter concernant le régime syrien. Ranimer ces plaies de passé toutes justes pansées avec la réconciliation entre Forces Libanaises et Courant Patriotique Libre, est une grossière erreur en d’autres termes.